Potentiel de l’ultime
Cartons
de Pascal Garnier



Combien de fois devra-t-on marteler ce que nous pensons des écrits de Pascal Garnier ? Autant de fois qu’il y a aura des textes pour le dire. Et désormais, le temps nous est compté…
Brice vient de quitter Lyon pour s’installer dans une maison à la campagne. Cette maison, il l’avait choisi avec sa femme. Mais celle-ci, journaliste, est parti en Egypte et n’est jamais revenue. Alors Brice l’attend, dans cette nouvelle maison, entouré des cartons du déménagement qu’il n’a pas encore ouverts. De contact avec le monde extérieur il n’a pas. Ou alors très peu. Comme avec Blanche, étrange femme évanescente, vivant seule elle aussi dans une grande bâtisse au bout du village.
Un inédit de Garnier sort chez Zulma et on guette, la bave aux lèvres. Et quand il arrive enfin, on l’a déjà fini. Garnier écrivait court et ça fait chier, pour dire les choses comme elles sont. Ca fait chier (on le répète, qu’importe, on est chez nous) parce que 1000 pages de Garnier n’y suffiraient pas. Pourtant Cartons n’en vaut pas un autre. On est dans la logique : des gens confrontés à leur solitude, incapable de franchir le pas pour s’accommoder au monde tel qu’il est. Oui, mais Cartons tout de même ou la continuité garnieriène. Ces phrases sèches qui veulent tout dire et son contraire, la plume d’un type qui passait huit heures à sa table de travail et concoctait un repas juste derrière pour passer une bonne soirée. Garnier et l’envie.
Ici comme ailleurs, on flanche sur ces personnages qui n’ont plus rien en banque à part la perte de l’autre. On trébuche sur cet auteur qui se moque de ses protagonistes avec un amour infini pour les secondes zones. On ricane de leurs déboires comme on ricane de nos meilleurs amis. On est sans pitié comme Garnier.
Il y a eu assez peu d’auteur comme lui. On mettra Manchette et Echenoz dans cette besace et on se dira qu’il n’y a qu’un seul survivant de cette écriture absolue. Et il nous restera la fouille : trouver des textes de Garnier que l’on n’a pas encore dévoré.
Cartons
Roman français de Pascal Garnier
Zulma – 2012 – 183 pages

Cet article a été rédigé par
Lise Poniatovski