Après un premier roman de 510 pages à La manufacture de livres en 2009, Margot D. Marguerite revient chez Baleine pour un opus plus maigre mais concentré en violence urbaine.
Lola est une adolescente. Elle vit avec son dealer, Papier, dans une cave, au fond d’une cité HLM, quelque part dans une banlieue grise. Et puis Lola est violée, Papier tué par le même homme. Le Grécos. Seule, Lola fait donc du Grécos son nouvel amant. Et tous deux se lancent sur la route dans une ultime razzia. Ce que veut Lola, c’est atteindre la steppe où l’attendent les barbares qu’elle soumettra à son unique volonté.
Lorsqu’en 2009, Margot D. Marguerite sort La vieille dame qui ne voulait par mourir avant de l’avoir refait, son premier roman à La manufacture de livres, on découvre une œuvre à tiroir, barrée, violente et poétique. Margot est un homme, un ex-clown comme le dit sa bio, et il a plutôt l’air d’en avoir sous le pied. Donc, on attend le second pour voir jusqu’où ce type est capable de nous embarquer.
Le second vient donc de paraître, chez Baleine. Première surprise : 108 pages. Seconde surprise : l’unité. Là où La vieille multipliait les points de vue, on se retrouve avec l’œil unique de Lola, ado toxico qui, si elle ne se prive pas de le faire et de le refaire encore, n’a aucun soucis avec la mort. Mais on ne peut pas se contenter de comparer deux romans d’un même auteur. Après tout, Lola est une sorte de concentré des capacités de Marguerite, tout aussi bien manié que le pavé précédent et l’essentiel est là. L’épure.
L’épure dans le gigantisme. Lola rêve de barbares, ses barbares, une armée qu’elle a levé dans sa tête et qui n’attend plus qu’elle pour dévaler les pentes de notre société, tout foutre à feu et à sang et ne rien laisser derrière que des ruines. Oui, Lola rêve de ruines. Des ruines pour tout le monde, un paysage aussi cramé que l’est son quotidien d’amibe oubliée, là-bas dans les confins d’une lointaine banlieue dont le nom ne ressort qu’épisodiquement, selon les règles de l’actualité sordide, putassière ou politique.
On ne reprochera qu’une chose à cette Lola dévastatrice. Elle ne rejoint jamais la réalité. On aurait aimé la voir débarquer, avec son Grécos, sur la place d’une grande cité et, armes aux poings, faire régner la terreur comme en son temps Florence Rey le fit. Le bout de cette équipée aurait eu le mérite de faire entrer en collision deux mondes. Le sien et le notre.
Lola, reine des barbares
Roman français de Margot D. Marguerite
Editions Baleine – Collection Baleine Noire – 108 pages - 2011