Potentiel des lendemains meilleurs
Zone Est
de Marin Ledun


Combien d’auteurs se sont posés la question de savoir de quoi le monde de demain sera fait ? Pour Marin Ledun, la réponse est simple : demain s’origine dans aujourd’hui, aujourd’hui n’est pas terrible, donc demain sera pire. Rajoutez à ça la technologie asservissante, et Zone Est advient.

La Zone Est correspond à l’ancien sillon rhodanien. Un virus s’est échappé sur le territoire français alors on a construit la Zone Est : une région murée sur des milliers de kilomètres carrés. Et dans ce parc, les survivants. Des êtres humains, infectés mais soignés, auquel on a remplacé chaque organe détruit par une prothèse à la technologie avancée. L’homme de la Zone Est est devenu une semie machine soumise à Medic’Corp, la société de fabrication de ces artefacts. Dans cette population condamnée à la végétation, il existe des être capables de lire dans la mémoire de leurs congénères. Ils en font commerce et Thomas Zigler est l’un d’entre eux. Et ce qu’il vient de lire dans la mémoire de son dernier contrat risque de faire basculer son monde : il y a des êtres humains pures et en bonne santé de l’autre coté du mur.

L’anticipation et la science -iction sont des domaines délicats pour leurs concepteurs. Plus ils s’éloignent de la période actuelle pour planter leur décor, plus ils doivent ramer pour expliquer comment la société contemporaine a pu accoucher de leur fiction. Trop souvent, les auteurs de ces récits consacrent une part énorme de leur roman à expliquer comment le monde en est arrivé là, y sacrifiant souvent le style et donnant à lire des centaines de pages pas toujours très digestes.

Marin Ledun, dont ce n’est pas la première incursion de ce coté-ci de la littérature, relève plutôt bien le défi. La plongée dans sa Zone Est se fait par paliers. Elle a trente ans d’existence, Thomas Zigler est né juste au moment de la construction du mur et il en connaît ce qu’on a bien voulu lui en dire. Une fois posés les fondamentaux nécessaires à la bonne compréhension de l’époque, Zigler va découvrir avec le lecteur ce qu’il se passe dans cette région. En lisant dans la mémoire de ses proies, il complète ces connaissances. Bonne maîtrise de l’intrigue. Là-dessus, Ledun rajoute une grosse dose d’informations technologiques dont la bonne compréhension n’est pas utile mais qui a au moins le mérite de faire exister sa société.

Atroce société. L’homme de la Zone Est n’a plus rien d’humain. Il va le redevenir par accident. Peinture du capitalisme guerrier jusqu’au bout des griffes, ce roman nous engloutie dans la dépendance aux virtuels et à la machine. Un long tunnel de soumission jusqu’à une possible délivrance.

Zone Est

Roman français de Marin Ledun

Fleuve Noir – 402 pages - 2011