On vous le hurlerait bien mais on est en retard d’un mois et demi sur la livraison : le dernier Tim Dorsey, le retour de son héros Serge A. Storm, est enfin sorti. On vous le hurlerait bien si on n’était pas aussi triste de l’avoir déjà fini.
Le grand père de Serge A. Storm est mort. C’était il y a longtemps, en 1964, après un braquage à l’issue duquel il avait récupéré quelques diamants égarés. En 2010, Serge décide donc de mener l’enquête. Tout ça, en sillonnant Miami à bord d’une limousine à châssis long dans laquelle il propose une visite touriste très spéciale de la Floride trash. Comme à son habitude, Serge est tellement dingue que contraint forcé, ses camardes de jeu le suivent aveuglément.
Putain, ça faisait trois ans qu’une trop petite catégorie de lecteurs français attendait ça. Trop petite parce qu’hélas Tim Dorsey est méconnu en France. A telle enseigne que les éditions Rivages ne le publie désormais plus qu’en format de poche. Vous me direz, un livre reste un livre. Oui, soit, mais quand vous avez tenu entre vos mains le grand format de Triggerfish Twist ou de Orange Crush, vous savez ce que peut réellement peser cet écrivain absolument branque et son héros dangereusement semblable. C’est un peu comme de regarder l’incendie d’Atlanta d’Autant en emporte le vent sur le cadran d’un téléphone portable. J’exagère ? Bien entendu.
Inutile de revenir sur la personnalité de Serge A. Storm et de son auteur. On va se contenter de vous signaler les précédents articles du Labo (là et là). A savoir juste que les deux ont cette capacité énorme à renaître des cendres qu’ils engendrent à chaque opus. Dans ce Cadillac Beach, Dorsey s’attaque enfin à Miami, ce carton pâte à vedettes cocaïnes, bâtit en équilibre précaire sur une faille sociale constituée de riches retraités, de dangereux criminels et de Cubains attendant la mort de Castro pour rentrer au pays. Un Miami plus pourri encore qu’exploite Serge en roulant à fond de cale dans ses rues de pacotille au volant d’une limousine criblée de balles. Oui, Serge a décidé de mettre à profit sa science floridienne pour inventer un trash tour pour touristes bord cadre. Impossible de faire la liste complète des passagers de cette arche désastreuse, mais ils en prennent tous pour leur argent. Quand Serge tient un truc, il ne le lâche pas.
Cadillac Beach est un épisode important dans la publication éparse et achronologique des aventures de Serge A. Storm. Rivages a en effet demandé à Christophe Dupuis, éminent libraire de la région girondine et spécialiste du polar, d’en signer la préface. Pour ceux qui n’auraient pas encore trempé le bout de leur palme dans cette saga totalement dingue, c’est donc une excellente introduction, détaillée et fournie.
Cadillac Beach
Roman américain de Tim Dorsey
Rivages/Noir – 425 pages – 2011